mardi 21 janvier 2014

Journée mondiale du migrant et du réfugié : la parole à la Pastorale des migrants du diocèse catholique de Strasbourg

Le prochain Cercle de Silence de Strasbourg aura lieu jeudi 30 janvier 2014 de 18h à 19h place Kléber, pour protester silencieusement contre la criminalisation des étrangers démunis de titre de séjour  

À l’occasion de la 100ème Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié, c'est la Pastorale des migrants du diocèse de Strasbourg qui a rédigé ce message.

Arrivés de Tchétchénie fin 2010, Salam, Makka et leurs trois enfants ont fui la guerre et les tensions qui règnent dans cette région de Russie. Leur demande d’asile a été rejetée faute de preuves des traumatismes qu’ils avaient subis. La France leur a demandé de rentrer chez eux.
Mais chez eux, c’est ici maintenant : depuis plus que trois ans Salam et sa famille construisent leur vie à Strasbourg. Les trois enfants vont à l’école et parlent très bien français. Suite au rejet de leur demande d’asile, la famille s’est trouvée à la rue et, ensuite, « grâce à l’hiver », une solution temporaire d’hébergement a été trouvée. Aujourd’hui, cette famille a déposé une nouvelle demande de régularisation pour pouvoir séjourner en France mais en attendant la réponse elle n’a aucun droit : ni de travailler, ni d’avoir une habitation pérenne, ni de subvenir d'une façon autonome à ses besoins quotidiens. Pour tout cela on l’oriente vers des associations caritatives…

Cette histoire est un exemple ; il en existe, malheureusement, d’autres et même plus dramatiques encore.
Comment faire entendre leur voix ? 
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Philippe Verry, membre du collectif Urgence-Welcome a réalisé un petit film (visible ici) : Après la période de Noël, une famille avec 5 enfants passe 8 nuits devant la gare de Mulhouse.
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En mai 2013 l’Église Catholique a organisé à Lourdes un grand rassemblement DIACONIA où la parole était donnée aux plus pauvres, aux plus fragiles, aux migrants aussi. Voici quelques voix que nous voulons citer ici et surtout soutenir :
  • Nous, migrants, nous ne sommes pas chez nous. Quand on arrive, on manque de tout. On ne peut même pas avoir le petit confort qu’on a laissé. Des fois, on n’arrive même pas à manger. Ici, c’est une société organisée, cette organisation ne nous permet pas de subvenir à nos besoins les plus élémentaires, parce qu’on n’a pas le droit de travailler. Or, on vient ici pour travailler, pas pour avoir des aides ! C’est la misère.
  • La misère pour un migrant, c’est d’être déraciné, de perdre ses attaches, d'être en précarité. On ne connaît personne, on n'a plus de repères, on est en souffrance affective.
  • Le regard de l’autre est traumatisant pour moi, il m’isole, je me sens différent, stigmatisé. Même si je suis en situation régulière, le regard que me jette la société est un rejet, qui me dit : « Rentre chez toi, rentre chez toi, tu n’as pas le droit d’être ici ! » Il y a une sorte de haine. Ce regard, je crois que c’est un « vrai » regard, alors que c’est du poison qui entre dans le cœur et je m’exclus moi-même.
  • Il y a comme une méfiance absolue, un refus obstiné d’aborder l’autre sans idée reçue, sans préjugés ! Cela peut venir des Français, mais aussi des migrants : ça fait partie de notre humanité commune. Nous avons tous du mal à accepter l’autre, complètement. Ce n’est pas facile de respecter une façon d’être qui n’est pas comme la mienne. Celui qui est différent, je pense qu’il n’a pas les mêmes capacités que moi ou parce qu’il n’est pas comme nous, je pense qu’il est mauvais.
  • Alors la peur, qui est un sentiment intérieur d’insécurité, s’installe.
  • Il faut changer pour vivre ensemble : « d’abord s’apprivoiser », s’approcher de l’autre, lui donner un nom, entrer en dialogue. Avoir de la curiosité, établir une relation harmonieuse, égalitaire, qui tienne compte des valeurs des uns et des autres.
  • La connaissance mutuelle a des limites qu’il faut accepter : l’autre reste un mystère, on n’épuise pas cette connaissance. Un proverbe dit : « le ventre d’une personne, c’est comme un pays, ou une nation, ou un continent, tu ne peux savoir tout ce qui est caché ».
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La Pastorale des migrants du diocèse de Strasbourg propose à l’occasion de la 100ème Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié, du 12 janvier au 23 février, un mois de rencontres pour contribuer, avec plusieurs associations partenaires qui œuvrent en faveur des migrants, à un changement du regard sur les migrations. (programme ici)

« Ne nous laissons pas envahir par la peur ! »



Pour y parvenir nous nous engageons ensemble à :
  • lutter contre les préjugés qui déforment notre regard et nous éloignent de la vérité 
  • éveiller les consciences : dépasser les effets négatifs et valoriser les retombées positives que les migrations engendrent
  • oser provoquer la dignité : permettre à chacun (celui qui est en demande et celui qui accueille) de grandir dans sa dignité d’homme
  • ne pas rester sur la compréhension de la réalité par la seule raison (aussi juste soit-elle !) mais mettre en avant la compétence du cœur : oser la fraternité !

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