mardi 16 avril 2019

Nous finançons l'enfer libyen : sommes-nous devenus fous ?


11ème anniversaire du cercle de silence de Strasbourg
mardi 30 avril 2019, 18h-19h pl. Kléber
rejoignez-le, quelques minutes ou toute l'heure !

Mardi 30 avril, le cercle de silence de Strasbourg « fêtera » son onzième anniversaire. Nous mettons à cette occasion le projecteur sur la Libye et la Méditerranée. Si vous le pouvez, pour marquer le coup, invitez des proches ou des amis à participer, au moins cette fois dans l'année. En signe de deuil pour tous les disparus en mer, vous pouvez venir vêtus en blanc ou avec du blanc dans le vêtement.

[Ajout le 29 avril : voyez ce documentaire d'Arte qui, enfin, informe clairement sur ce qui se passe. Il est visible jusqu'au 25 mai 2019.]
En France, nous enfermons des étrangers en Centre de Rétention. Mais loin d'ici, c'est la Libye entière qui est devenue un « camp de concentration à ciel ouvert, financé par l'Union Européenne », selon le mot du maire de Palerme. La Méditerranée en est la gardienne meurtrière.
Les témoignages s'accumulent : les étrangers en Libye vivent l'enfer. Une longue mission de l'ONU (2018) décrit des « horreurs inimaginables ». Ils sont « à la merci d'innombrables prédateurs qui les considèrent comme des marchandises à exploiter et à extorquer », « l'écrasante majorité des femmes et des adolescentes » déclare avoir été « violées par des passeurs ou des trafiquants ». « D'innombrables migrants et réfugiés ont perdu la vie en captivité tués par des passeurs, après avoir été abattus, torturés à mort ou tout simplement avoir été laissés mourir de faim ou de négligence médicale ». « Dans toute la Libye, des corps non identifiés de migrants et de réfugiés portant des blessures par balle, des marques de torture et des brûlures sont fréquemment découverts dans des poubelles, des lits de rivière asséchés, des fermes et le désert. »
Les étrangers sont entassés dans des prisons sordides, mal nourris, sans soins. ou ailleurs, ils sont donc torturés, vendus comme esclaves, ou tués à discrétionpar les autorités, ou n'importe qui. Et la Libye est en guerre. Enfin, les Libyens rapatrient systématiquement chez eux les occupants de bateaux de fortune secourus ou interceptés en mer.
Que font les États de l'Union Européenne ? Depuis 2015, ils donnent à la Libye les moyens financiers, techniques (bateaux, « formation » des garde-côtes, centre de coordination naval…) et juridiques de retenir encore mieux les gens qui veulent la fuir, pour l'Europe. Avec leur aide, le pays a fait reconnaître internationalement (juin 2018) une vaste zone au large de ses côtes, où il est responsable de coordonner les secours. Depuis, quand il ne laisse pas des bateaux couler, ce qui arrive, il ordonne aux navires privés ayant secouru des naufragés de les débarquer chez lui. Ces ordres sont illégaux, le Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU l'a répété avec insistance : car le débarquement doit se faire en lieu sûr. Mais il n'y a aucun recours. Ce Haut-Commissariat appelle nos États à modifier leur action. En 2017 et 2018, 29 000 personnes ont été ainsi ramenées de force en Libye.
Parfois, des naufragés sont cependant recueillis hors des griffes libyennes. Pendant des années, ils ont été débarqués en Italie et à Malte. Ces pays, laissés soigneusement seuls par les autres États européens pour accueillir ces gens, refusent désormais tout débarquement. Et tous nos États empêchent par tous les moyens les rares bateaux associatifs de secourir ou de débarquer des naufragés. Désimmatriculé sous pression italienne, l'Aquarius n'a trouvé aucun État pour lui accorder son pavillon. Rien que depuis 2014, plus de 17000 personnes sont mortes en Méditerranée selon le recensement de l'Organisation Maritime Internationale.
Le cercle de silence invite ce mois-ci à rendre hommage à tous ces gens, en silence : venez, même quelques minutes.
Et interpellez par là nos dirigeants : sommes-nous devenus fous ?


Note. Le New York Times s'est procuré une vidéo d'un « sauvetage » par une vedette libyenne et l'a précisément commentée. Traduite, elle est ici. Pour comprendre ce qui se passe, elle est un document à voir absolument.

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